Aurélia Vertaldi
Le roman culte de James Ellroy, prochain invité du festival Quai du polar à Lyon, est adapté pour la première fois en bande dessinée. Le célèbre réalisateur David Fincher a collaboré au scénario de la BD signée Miles Hyman et Matz. Époustouflant de noirceur et d'élégance.
La ville de Los Angeles a été longtemps secouée par la macabre découverte, le 15 janvier 1947, du cadavre atrocement mutilé de Betty short, alias le Dahlia noir. L'affaire obséda, dès son plus jeune âge, l'écrivain américain James Ellroy, qui s'en inspira pour écrire le roman de la consécration, Le Dahlia noir. La gageure est toujours de taille. Rivaliser avec le succès planétaire du roman noir le plus fameux des dernières décennies. Le cinéma s'y est frotté avec plus ou moins de succès (de Brian de Palma, en 2006). Aujourd'hui, vient le tour de la bande dessinée.
L'univers âpre et funeste de James Ellroy
Pari réussi pour Miles Hyman, Matz, et David Fincher. Après avoir obtenu l'aval de son créateur, Il aura fallu plus d'une année de travail aux trois auteurs pour transposer le roman culte. L'album porte tous les stigmates de l'univers âpre et funeste de James Ellroy. L'évocation du Los Angeles des années 40, la corruption, la tourmente et la fascination morbide des personnages pour un cadavre...Tout y est.
L'album ne relève pas simplement de la mise en image d'un texte mythique, mais bien d'une oeuvre à la réinterprétation magistrale. Le découpage de Matz secondé par le réalisateur David Fincher, parfaitement relayé par le graphisme du grand Miles Hyman relèvent de la virtuosité.
Une enquête qui vire à l'obsession
Le dessin au fusain de Hyman explore la plus grande étendue de gris possible, permettant un jeu avec les ombres qui reflète la noirceur légendaire du roman. Un trait dense qui rend admirablement cette obscurité, apanage du Los Angeles chaotique d'après-guerre, décrite par Ellroy.
La ville, personnage à part entière, est un lieu terrifiant, l'antre de tous les vices et recoins sombres de la société américaine. Bouges, entrepôts désaffectés, motel glauque, commissariats poussiéreux plantent un décor où corruptions, personnages tourmentés s'oubliant dans la drogue ou l'alcool, prostitution et meurtres sordides constituent le quotidien des citadins. Les auteurs ont parfaitement saisi l'ambiance.
Une réinterprétation magistrale
Quant aux protagonistes cabossés Dwight Bleichert dit «Bucky», et Leland Blanchard surnommé «Lee» , ils se démènent dans cet univers pour ne pas sombrer. Tous deux s'engouffrent dans une enquête qui vire peu à peu à l'obsession, nourrissant une fascination morbide pour la jeune Betty Short. Une investigation autour de laquelle gravitent, ingénieusement mis en scène, une multitude de personnages secondaires ravagés hauts en couleurs.
Telle la madeleine proustienne, le Dahlia noir fait remonter les souvenirs putrides à la surface, qu'il faut exorciser coûte que coûte. Les auteurs l'ont parfaitement compris, et l'affaire Betty Short n'a pas fini de bouleverser les âmes, grâce à la réinterprétation magistrale de Fincher, Matz et Hyman.
Le Dahlia noir, Miles Hyman, Matz et David Fincher, Casterman, collection Rivages/Casterman/noir, 20€, parution le 13 novembre.
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