6 d’octubre del 2023

ALIBI deixa de publicar-se


  [Bouhadjera, Hocine. L'aventure Alibi, consacrée au polar et à son univers, s'arrête. Publicat el 4 d'octubre del 2023 a actualitte.com

Un dernier numéro sortira en librairie le 6 octobre prochain pour clore à nouveau l’aventure d'Alibi, débutée en 2011, jusqu’en 2015. Cinq ans plus tard, arrivait un mook trimestriel : textes plus longs, plus de photos et d'illustrations, de nouvelles rubriques, ainsi qu'une maison d'édition et un podcast. 3 ans et 15 numéros d’une seconde vie portée par l’éditeur Dargaud, qui a choisi d’arrêter, faute d’avoir trouvé un équilibre financier.

Sollicitée par ActuaLitté, la directrice éditoriale, Alice Monéger, opère un constat implacable  : « Malgré une énergie débordante et une ambition sans faille de toute l'équipe, la revue n'a pas réussi à générer suffisamment d'abonnements et de ventes en kiosque pour compenser les dépenses, condamnant le projet.»

Un projet tricéphale

Déjà en 2012, le projet que portaient le journaliste Marc Fernandez et le photographe Paolo Bevilacqua cessa son activité après huit numéros, avant de revenir en 2013. Les raisons : des difficultés financières auxquelles s'ajoutaient des problèmes de diffusion et de distribution.

La réalisation du neuvième numéro passa alors par une souscription, qu'avaient soutenue des figures du secteur comme R.J. Ellory, Henri Loevenbruck ou Olivier Truc. Et pour cause : la revue se destinait aux aficionados des romans policiers et autres histoires criminelles.

Insuffisant néanmoins sur la durée : la revue prend fin en 2015, et restera en sommeil jusqu'en 2020, relancée par l'éditeur Dargaud, filiale de Média Participations. Alice Monéger quittait ainsi la direction éditoriale de Points pour impulser ce nouvel essor, mais pas seulement : « J'ai proposé de relancer le titre en le couplant avec une collection de romans et des podcasts sur le genre », nous précise-t-elle. Marc Fernandez en demeurait le rédacteur en chef et Paolo Bevilacqua, le directeur artistique.


Dans les numéros de cette nouvelle mouture ? Les plus grands noms du polar français ou étranger, la présence de véritables acteurs du monde du crime (policiers, avocats, légistes, juges, détectives, voyous...), mais aussi des enquêtes, reportages, portraits, interviews, BD reportages, et enfin des chroniques de nouveautés ou de choix éditoriaux : « La revue Alibi s'est toujours distinguée par son regard décalé, présentant par un exemple dans un numéro sur les serial killers, non pas les récits les plus célèbres, mais des histoires moins connues », poursuit Alice Monéger.

192 pages, du beau papier, pour un « bel objet », et le choix de la librairie et de l'abonnement : la présence en kiosque exige des tirages importants (chaque numéro d'Alibi était tiré à 3000 exemplaires).

Élémentaire, mon cher Watson...

Trop d'ambitions face à un contexte des plus difficiles pour toutes les revues papier ? Si le prix est passé de 17 à 19 euros, la hausse tarifaire n'a pas compensé l'augmentation considérable des coûts du papier ni soutenir le poids d'une bonne quinzaine de collaborateurs par numéro. « Aurait-il fallu proposer un trimestriel moins riche et moins cher ? », se demande aujourd'hui Alice Monéger, sans réponse définitive à apporter.

Selon Edistat, qui prend en compte les ventes en France, donc hors abonnements, si le numéro 10 de juillet 2022 s'est écoulé à 548 exemplaires et le 11 à 620 exemplaires, les 12, 13 et 14 ont été vendus entre 287 et 367 exemplaires, soit une chute de quasi moitié : « La revue de librairie est une toute petite niche », constate la directrice éditoriale. En outre, pas de réassort : « Même si un bon nombre d'articles des anciens numéros peut toujours être lu, le produit reste millésimé », analyse cette dernière.

Côté abonnements, des bibliothèques et médiathèques, des acteurs du monde judiciaire beaucoup - policiers, avocats, greffiers... -, mais là encore, pas assez. Autre choix fort : ne pas proposer de version numérique. « Le contenu était toujours d’une grande qualité : on ne saisit pas pourquoi ça n’a pas pris », nous confie un représentant de Média Diffusion. « Maintenant, nous savons que la revue ne marche absolument pas malgré les nombreux essais des libraires de bonne volonté. »


À deux jours de la parutions du 15e et dernier Alibi dans cette version, Alice Monéger partage ses interrogations : « Peut-être aurions-nous dû, dès le départ, nous appuyer sur du financement participatif, à l'instar de la revue Socialter, ou comme la nouvelle revue tournée vers l'Est, Kometa. » Une solution très contemporaine, qui permet de constituer des communautés sensibilisées, et que l'on implique plus facilement – la réussite hors norme du Mook Dune restera l'une des références en la matière.

Dans l'Alibi de ce 6 octobre, les lecteurs profiteront d'un portrait de Raphaël Nedilko, le flic des cold cases, d'un récit de L’Affaire Thomas Quick, condamné pour 8 des 33 meurtres qu’il a avoués, d'une rencontre avec un ténor du barreau, Franck Berton, et d'une immersion en BD Reportage au sein de la police municipale de Rennes, par le dessinateur Nicoby.

Fin de la maison, le podcast à suivre ?

« En tant qu'éditrice, la maison d'édition représentait pour moi une suite logique par rapport à mon parcours », explique Alice Monéger pour préciser son choix. Les débuts furent difficiles, confesse-t-elle : « Nous avons monté un label, Filature, lancé le 1er avril 2020, un timing qui n'a pas été de note côté..., et avec le recul, même si à l'époque il semblait judicieux de séparer les deux entités, j'ai réalisé que cela était une fausse bonne idée. » En mars 2022, la maison est ainsi intégrée au label Alibi.

« À partir de cette date, nous avons redoublé d'efforts, travaillant méticuleusement sur notre présence sur les réseaux sociaux, tout en tissant des liens solides avec les libraires », ajoute l'ancienne responsable aux éditions du Masque. Actuellement, l'équipe éditoriale fait le point sur le devenir des titres commercialisés : « Nous sommes en pleine réflexion sur la direction à prendre pour l'avenir », résume Alice Monéger.

Et l'expérience apporte déjà quelques remarques. « On termine l'année avec le dernier numéro et on va voir. En tout cas, il sera nécessaire d'inventer une autre forme si le projet à un avenir, car dans les conditions actuelles, ce n'est pas viable », décrit la directrice éditoriale sans faux semblants.


Une piste serait de se concentrer sur les  podcasts : « Sans prétention, Marc Fernandez, Paolo Bevilacqua et moi sommes des experts du polar, passionnés par le genre. Nous en lisons énormément, connaissons de nombreux auteurs et avons des contacts privilégiés avec des professionnels du milieu : ce serait dommage de ne pas s'appuyer dessus », développe-t-elle.

Depuis le 1er confinement, l'équipe derrière la revue trimestrielle proposait un podcast de discussion d'une durée d'environ trente minutes, autour d'affaires criminelles. Actualité du polar et des faits divers, en compagnie d'un invité spécialisé dans ce domaine, le trio plonge dans l'univers sombre du crime. À chaque épisode, ils approfondissent par ailleurs un sujet qui a été traité dans le dernier numéro de la revue Alibi, dévoilant les coulisses de sa création.

Problème du genre polar

Si le podcast est finalement maintenu, son contenu connaîtrait évidemment une évolution, avec une principale difficulté : le modèle économique : « Le medium demande beaucoup d'investissements en temps, montage, mise en scène, écriture... ce qui coûte de l'argent. La seule manière de couvrir les coûts de production d'un podcast est de vendre une série à une plateforme », constate la professionnelle de l'édition.

Et de s'étonner : « Je ne sais pas pourquoi, pour le genre de l'Imaginaire, il existe de vraies communautés de lecteurs, engagées. Pour le polar, genre des plus plébiscités chez nous, il n'y a pas ce sentiment d'appartenance, mise à part la grande messe bien ponctuelle de Quai du Polar à Lyon. »

Elle conclut, comme un appel : « J'ignore s'il y aura une suite à Alibi, ou un autre projet qui prendra le relai, je constate en tout cas qu'il y a de moins en moins de place pour parler du polar dans la presse, les magazines, alors qu'il suffit de suivre les classements hebdomadaires des meilleures ventes pour en constater la popularité et l'importance. »

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