En seulement cinq romans (« La moisson rouge », 1929, « Sang maudit », 1929, « Le faucon de Malte », 1930, « La clé de verre », 1931, « L’introuvable », 1934), Dashiell Hammett (1894-1961) a inventé le roman noir américain. Ancien détective de l’agence Pinkerton, très handicapé par une tuberculose, il n’avait trouvé comme seul moyen de subsistance que de publier des nouvelles policières dans des revues populaires, les pulps magazine, dont la plus connue est Black Mask. Autour des aventures de son héros, Sam Spade, un détective de la Continental, immortalisé au cinéma par Humphrey Bogart, il y développe les bases d’un style, le hard boiled (l’atmosphère, les lieux, les personnages priment sur la résolution de l’intrigue), qui fait encore école. À partir de 1934, il arrête de publier, vit des adaptations de ses scénarios à Hollywood et tente, en vain, d’écrire des romans plus « littéraires ». En fait, depuis le début, Hammett voulait briser l’étiquette d’auteur de romans policiers dans laquelle on le cantonnait. Mais sa dernière compagne, l’écrivain Lillian Hellman fit tout pour l’en empêcher et, à sa mort, mit sous le boisseau tous ses écrits qui ne relevaient pas du genre policier. Ils n’étaient consultables qu’au Harry Ransom Center de l’Université du Texas. Après de nombreux rebondissements dus au changement d’ayants droits (désormais la fille et la petite-fille d’Hammett), les voici donc publiés et rendus accessibles au public. On y découvre un autre Hammett, qui met la violence au second plan, s’attache à développer les facettes de ses personnages, privilégie le rôle des femmes et cherche à restituer de véritables « tranches de vie », comme dans « A dix contre un », où il retrace les exploits d’un joueur de base-ball légendaire, Joe DiMaggio. Grâce à la lecture de trois scénarios, le Hammett « hollywoodien » apparaît également dans toute sa complexité, plus proche d’Hemingway, en fait, que de n’importe quel autre auteur de polar. L’ébauche d’une nouvelle aventure de Sam Spade (future nouvelle ? point de départ d’un roman ?), datant sans doute de 1932, quant à elle, souligne les contradictions d’un écrivain pris entre ses aspirations littéraires et la nécessité de gagner sa vie en se servant d’une machine à écrire…
. Dashiell Hammett, « Le chasseur et autres histoires », traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Natalie Beunat, coll. « Du monde entier », Gallimard, 380 p., 22 euros.
À signaler également : « Dashiell Hammett -Un type bien- Correspondance 1921-1960 », Points et « Terreur dans la nuit », dix nouvelles horrifiques présentées et sélectionnées par Dashiell Hammett, Fleuve Editions, 224 p., 14,90 euros.
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